lundi 27 avril 2009

S'abstraire de la figuration ?


« Créer une œuvre, c’est créer un monde » Vassily Kandinsky (1866 – 1944)

Kandinsky est mort l’année de ma naissance. A chaque naissance, se crée un monde nouveau. Chacun l’explore selon ses capacités. Certains ne dépassent pas le bout de leur nez. D’autres se perdent à l’infini. Les traces laissées mesurent tout cela.
Kandinsky et Pollock affectent à la peinture des notions d’abstraction. Qu’ont-ils arraché à la réalité pour obtenir une abstraction ?
Quelques fibres du corps, quelques pas de danse. En ce sens la peinture abstraite rejoint la figuration, non pas en représentant une personne, mais en y déposant les traces d’un corps. Comme un mégot qui fume dans le cendrier d’une chambre vide, ou les confetti collés au sol le lendemain d’un carnaval, les traces sont les témoins d’une présence.
Pour qu’une peinture abstraite existe, il faudrait qu’elle ne quitte jamais le siège de la pensée. Dans toute peinture abstraite, quand le corps n’est pas représenté, le support s’en charge. Il l’incarnera. On ne se débarrasse pas du corps. Le corps a toujours le dernier mot sur la pensée.

Voici ce qu’écrivait Kandkinsky à propos du plan originel* :
« Le rapport de chaque être vivant avec le haut et le bas se retrouve aussi sur le plan originel qui est lui-même un être vivant. Ceci peut aussi être expliqué comme une association d’idées, comme la transposition de ses propres observations sur le support. En tout cas ce fait a des racines profondes et vivantes. Pour un non initié cette constatation peut sembler étrange. Mais il me semble que chaque artiste, même inconsciemment, doit se rendre compte de la « respiration » du plan originel encore vierge. Il ressentira plus ou moins consciemment sa responsabilité envers cet « être ». Il devient conscient qu’un mauvais traitement irréfléchi deviendrait meurtrier. L’artiste féconde cet être et il sait avec combien de docilité et de « bonheur » le support accepte les éléments appropriés dans l’ordre voulu. Cet organisme quoique primitif devient par un traitement juste un organisme nouveau aussi vivant qui n’est plus primitif, mais possède toutes les qualités d’un organisme développé. »

*Point, ligne, surface. Ouvrage paru en 1926
Le plan originel est la surface d’inscription, le support

2 commentaires:

  1. C'est étrange.
    Je viens de terminer 6 années consécutives de collège et d'université, après lesquelles je me suis senti affecté d'une paresse mentale, un état de saturation de l'esprit qui m'enleva le goût de quoi que ce soit de culturel. À vous lire, j'ai l'impression de revenir à moi, de reprendre mes esprits et mon goût de l'apprentissage. J'adore votre style.

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  2. "il me semble que chaque artiste, même inconsciemment, doit se rendre compte de la « respiration » du plan originel encore vierge."
    - tout à fait, et c'est l'objet justement de la prise de conscience que j'explicite dans le rapport vertical horizontal...
    dans http://ecritscris.wordpress.com/2012/03/16/jackson-pollock-lalternative-verticale-horizontale/

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